Echanges Culturels
Son histoire débute en 1954 par l’acquisition d’un terrain de 775 m2 à l’angle du Square du Théâtre et de la rue Catinat, par Antonin Emery et Marius Mallein. Après avoir obtenu l’autorisation de détruite les anciens bâtiments, ils créent le 24 mai 1954, la société Catinat Foncier dont les bureaux sont au 18 Ton That Dam Street.
L’Hôtel Caravelle de Saigon ouvre ses portes au public le 24 décembre 1959, 7 mois après l’inauguration officielle du bâtiment. Son nom, comme celui de l’avion exploité à cette époque par la compagnie Air France, présente sur place, évoque les bateaux de Christophe Colomb, un symbole fort d’aventures et de découvertes pour les visiteurs étrangers.
Situé au 19 Lam Son Square dans le 1er district, il est conçu par les architectes vietnamiens Nguyen Quang Nhac, Pham Van Thang et Nguyen Van Hoa et le français Gille Masson pour être l’hôtel le plus luxueux de la ville. Il est le premier à être doté d’un équipement moderne dont un générateur Berliet et des climatiseurs Trane. Le hall est recouvert de marbre italien et ses fenêtres sont à l’épreuve des balles.
Son confort attire de prestigieuses entreprises comme Air France, les ambassades d’Australie et de Nouvelle Zélande et pendant le conflit entre le Nord et le Sud Vietnam (soutenu par les Etats-Unis), les compagnies américaines CBS, NBC, le Washington Post et le New York Times.
De nombreux correspondants de guerre fréquentent alors ce lieu qui devient le Club de la Presse non officielle de Saigon et notamment :
- David Halberstam est correspondant du New York Times à Saigon depuis septembre 1962. Il assiste le 11 juin 1963 à l’immolation du moine bouddhiste Thich Quang Duc en signe de protestation contre les persécutions du Président Ngo Dinh Diem et de l’administration sud-vietnamienne (soutenus par les Etats-Unis) envers les bouddhistes. Il est lauréat du prix Pulitzer en 1964 et du prix George Polk.
- Malcolm W Browne, photographe de l’Associated Press, auteur du cliché qui fera le tour du monde montrant l’immolation du moine bouddhiste Thich Quang Duc. Il reçoit le prix Pulitzer en 1964.
- Peter Arnett, journaliste néo-zélandais, arrivé le 26 juin 1962, correspondant de l’Associated Press, prix Pulitzer en 1966 qui restera au Vietnam jusqu’en 1970.
- Neil Sheehan, jeune correspondant de guerre employé par l’Agence UPI en 1963 : «Les rangées de maisons sans toit ressemblaient à des villages de huttes que les enfants auraient érigés pour jouer puis bizarrement abandonnés», rejoint le New York Times à son retour du Vietnam, reçoit le National Book Award en 1988 et le prix Pulitzer en 1989.
- Morley Safer, journaliste canadien, employé à CBS (il révèle l’incendie volontaire du village civil de Cam Ney par les G.I en août 1965), lauréat du prix George Polk, il déclarera : « Être patriotique ne veut pas dire agiter un drapeau. C’est autre chose. C’est s’interroger, exercer tous ses droits démocratiques ».
- Walter Cronkite surnommé « L’homme en qui les Américains avaient le plus confiance », lauréat du prix George Polk, devient présentateur du journal télévisé CBS Evening News de 1962 à 1981. Le 27 février 1968, après l’offensive du Têt, il appelle publiquement à la négociation. « Si j’ai perdu Cronkite, confia le Président Johnson à l’un de ses conseillers, j’ai perdu le peupleaméricain » […].
- Ward Just, journaliste américain, est correspondant pour Newsweek et le Washington Post entre 1959 et 1969. Par la suite, il écrit des nouvelles et des fictions qui sont souvent retenues en finale pour des prix comme le O. Henry Award en 1985 et 1986, le National Book Award en 1997 et le Prix Pulitzer pour la Fiction en 2005.
- Michael Herr est le correspondant du journal Esquire. Il reste au Vietnam de 1967 à 1969. Il écrit de nombreux livres dont « Dispaches » qui sert de trame en 1987, au film de guerre à succès « Full Metal Jacket » de Stanley Kubrick auquel il apporte sa collaboration pour le scénario. Il participe aussi à l’écriture du film « Apocalypse Now » de Francis Coppola et prête sa voix -off » au film.
Le bar sur le toit au 10ème étage est alors l’observatoire privilégié de la ville et de ses soubresauts, avec ses rencontres et ses intrigues. Après la guerre, certains journalistes affirmeront qu’ils pouvaient couvrir les évènements sans bouger de leur tabouret !
Le 25 août 1964 vers 11h30, l’éclatement d’une bombe dans la chambre 514 vient troubler la quiétude du lieu. 9 chambres sont endommagées et les éclats des fenêtres soufflées blesseront quelques personnes.
En 1975, après la prise de Saigon, l’hôtel est pris en charge et exploité par le gouvernement. Il est renommé Hôtel Doc Lap (indépendance). En 1988, il a l’autorisation d’ouvrir une discothèque.
En 1992, Saigon Tourist Holding Company s’associe avec Glynhill Investment Vietnam (Lai Sun – Hong Kong & Keck Seng – Singapore) pour devenir Chains Caravelle Hotel Joint Venture Company. 135 chambres sont rénovées et trans Antonin Emery formées en 75 plus spacieuses.
En 1998, l’hôtel retrouve son nom Caravelle. Après un an de fermeture, il rouvre au mois de mai après avoir subi une rénovation complète et l’adjonction d’une tour complémentaire de 24 étages dont les fondations avaient débuté dès 1993.
Des cinquante ans d’existence de l’Hôtel Caravelle, on retiendra les noms de ses occupants illustres pendant le conflit Vietnamien…et sa terrasse !